« Le climat pour vos classes » , une série de webinaires interactifs pour les enseignants !
Dans le cadre de l’Année des géosciences, l’Office for Climate Education et le CNRS ont le plaisir de vous convier à leur série de webinaires interactifs « Le climat pour vos classes » tous les premiers mercredis du mois, d’octobre 2024 à juin 2025.
Ces rendez-vous mensuels sont conçus comme un espace d'échange interactif entre scientifiques et professeurs. Ils s'adressent aux enseignants de toutes les disciplines et de tous niveaux, primaires comme secondaires.
Chaque webinaire est composé d’un d’exposé de 30 minutes par le ou la scientifique, d'une présentation d’outils pédagogiques en lien avec la thématique animé par les médiateurs de l'OCE et de 20 minutes d’échanges.
🗓️ Découvrez les webinaires à venir et inscrivez-vous dès à présent !
- Mercredi 5 février 2025 à 18h : "La justice climatique & les conventions internationales sur le climat, avec Marta Torre Schaub, chercheuse CNRS, enseignante à l’Université Paris 1 et Sciences Po Paris et directrice du GDR ClimaLex 🔶 Inscriptions
- Mercredi 5 mars 2025, à 18h : Climat, agriculture et alimentation, avec Samuel Rébulard, Professeur agrégé à l’Université Paris-Saclay 🔶 Inscriptions
- Mercredi 2 avril 2025, à 18h : "Climat et biodiversité", avec Sandra Lavorel, écologue au CNRS, médaille d’or du CNRS 🔶 Inscriptions
- Mercredi 7 mai 2025, à 18h : thème et intervenant à venir
- Mercredi 4 juin 2025, à 18h : "La ressource en eau dans un climat qui change", avec Yves Tramblay, hydrologue à l'IRD 🔶 Inscriptions
WEBINAIRE#1 "Les rapports du GIEC & les projections climatiques", avec Robert Vautard, climatologue au CNRS et co-président du GIEC
💬 Que veut dire SSP au lieu de RCP utilisé avant ?
Dans le cadre du 5ᵉ rapport d’évaluation du GIEC, publié entre 2013 et 2014, les experts ont défini quatre profils représentatifs d’évolution des concentrations de gaz à effet de serre (GES) pour le XXIᵉ siècle et au-delà. Ces trajectoires, appelées RCP (Représentative Concentration Pathways), couvrent un large éventail de scénarios possibles, allant d’efforts très limités à des réductions substantielles des émissions de GES à l’échelle mondiale. Sur la base de ces profils, les climatologues analysent les conditions climatiques futures ainsi que les impacts associés à chaque trajectoire. En complément, des économistes et des sociologues ont élaboré des scénarios socio-économiques, appelés SSP (Shared Socioeconomic Pathways), qui décrivent différents types de développements socio-économiques ainsi que diverses stratégies d’adaptation et d’atténuation. Ces scénarios permettent de combiner des variables socio-économiques avec les profils RCP, créant ainsi cinq grandes familles de scénarios. Cette approche intégrée favorise une cohérence entre les travaux des climatologues, des économistes et des sociologues, enrichissant ainsi l’analyse des impacts et des solutions au changement climatique.
💬 J'ai peur du côté anxiogène du sujet. Comment être précis sans être alarmiste ? Je suis toujours un peu courte sur les solutions à envisager pour que les élèves ne partent pas de la séquence en se disant qu'ils sont condamnés.
Il est essentiel de transformer l'anxiété des élèves en un moteur d'action positive. En les encourageant à s'engager dans des actions concrètes, locales et innovantes, vous pouvez leur montrer qu’ils ont un rôle à jouer dans la construction d’un avenir durable. Cela peut renforcer leur sentiment d’efficacité personnelle et leur offrir une perspective plus optimiste sur leur capacité à faire la différence. Impliquer les élèves dans des projets collaboratifs, comme des ateliers de réflexion sur des solutions locales ou des actions concrètes dans leur école ou leur communauté, peut également les aider à se projeter dans un futur plus engageant et porteur d’espoir. Enfin, veillez à inclure des discussions sur les solutions déjà en œuvre à l'échelle locale, nationale et internationale, ainsi que sur les innovations prometteuses. Cela permet de contrebalancer les constats souvent difficiles liés au changement climatique.
💬 Faut-il plutôt parler de changement climatique ou de réchauffement climatique ?
Il est généralement préférable d’utiliser le terme « changement climatique », car il reflète la diversité des phénomènes en cours : bien que la tendance globale soit au réchauffement, ses effets ne sont ni homogènes ni linéaires. Par exemple, certaines régions peuvent connaître des périodes de refroidissement local ou des perturbations climatiques différentes (sécheresses, inondations, tempêtes, etc.). Ce choix de terminologie permet également d'éviter les contestations fréquentes des climatosceptiques, qui utilisent souvent des épisodes de refroidissement ponctuel pour remettre en question la réalité du réchauffement global. "Changement climatique" met l'accent sur la complexité et l'ampleur des bouleversements environnementaux, au-delà de la seule augmentation des températures.
💬 On entend souvent dans les médias que les stocks de pétrole s'épuisent. Et certains de mes élèves disent qu’on n’a qu’à attendre que les stocks se vident. Que dois-je leur répondre ?
Vous pouvez expliquer à vos élèves que compter sur l'épuisement des stocks de pétrole, de gaz ou de charbon n’est pas une solution, car en attendant, les émissions de gaz à effet de serre (GES) continuent de s’accumuler dans l’atmosphère. Cette accumulation a déjà des conséquences importantes, notamment sur la température globale, qui augmente, les océans, qui se réchauffent et s'acidifient, et la biodiversité, fortement impactée par les changements d’habitats. Le cycle de l’eau est également perturbé, avec des événements extrêmes plus fréquents et intenses. Si nous dépassons certains seuils critiques, des phénomènes d’emballement climatique pourraient se produire, tels que le dégel du permafrost, qui libère du méthane, un puissant GES, ou la perte des puits de carbone due aux incendies massifs et à la déforestation. La fonte des glaciers et des calottes glaciaires accélère la montée des eaux et modifie l’albédo, augmentant encore le réchauffement. Ces phénomènes sont irréversibles et empêcheraient tout retour à la normale, même après la disparition des énergies fossiles. C'est pourquoi il est crucial d’agir dès maintenant pour réduire nos émissions de GES et mettre en place des alternatives durables, sans attendre un épuisement naturel des stocks. Nous disposons aujourd’hui de solutions pour limiter ces impacts et construire un avenir plus respectueux de l’environnement.
💬 À quoi correspond un cycle de rapport du GIEC et comment les rapports sont-ils utilisés par les gouvernements ?
Un cycle de rapport du GIEC dure généralement entre cinq et sept ans, ce qui correspond au temps nécessaire pour établir un rapport d’évaluation complet. Ces rapports synthétisent l’état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques sur le changement climatique, ses impacts, ainsi que les options d’adaptation et d’atténuation. L’une des spécificités du GIEC est d’associer les États au processus d’élaboration des rapports, bien qu’ils n’interviennent qu’à la toute fin du cycle. Lors de cette phase finale, les représentants des gouvernements examinent et adoptent ligne par ligne le "résumé pour décideurs", un document clé destiné à traduire les conclusions scientifiques en un langage accessible et exploitable par les décideurs politiques. Ce processus se fait sous le contrôle des scientifiques, qui veillent à ce que le contenu reste fidèle aux données et analyses présentées dans le rapport complet. Cette collaboration garantit une meilleure appropriation des résultats par les gouvernements tout en maintenant la rigueur scientifique des rapports du GIEC.
WEBINAIRE#2 "Variabilité naturelle du climat à l’échelle des temps géologiques", avec Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue au CEA Membre du Haut conseil pour le climat
💬 Ces modèles tiennent-ils compte du dégel du permafrost ? Peut-on vraiment tabler sur une stagnation des émissions de CO₂ dans le contexte géopolitique actuel ?
Les modèles climatiques intègrent de plus en plus les effets du dégel du permafrost, bien que cela reste un domaine de forte incertitude. On estime que le volume de permafrost de surface pourrait diminuer d’environ 25 % par degré de réchauffement planétaire, libérant des flux de CO₂ et de méthane. Ces émissions supplémentaires sont cependant complexes à prévoir avec précision, car elles dépendent aussi d’effets compensateurs, comme une éventuelle augmentation de la végétation dans les régions polaires, qui pourrait absorber une partie du CO₂. Malgré ces incertitudes, il est important de noter que les émissions liées au dégel du permafrost agissent comme une rétroaction amplificatrice, mais elles restent secondaires par rapport aux émissions directes issues des activités humaines. Cela signifie que l'évolution de nos émissions industrielles, énergétiques et agricoles reste le principal levier pour limiter le réchauffement. Dans le contexte géopolitique actuel, tabler sur une stagnation des émissions de CO₂ est ambitieux et incertain. Les efforts pour réduire ces émissions devront non seulement prendre en compte les engagements nationaux, mais également anticiper les rétroactions naturelles, comme celles liées au permafrost, qui pourraient exiger des actions supplémentaires pour atteindre les objectifs climatiques à long terme.
💬 Est-il vrai que la prochaine période glaciaire ne pourrait pas survenir avant 100 000 ans au lieu de 2 000 ans environ, en raison du taux élevé de CO₂ atmosphérique ?
Oui, les modèles climatiques suggèrent que la prochaine période glaciaire pourrait être repoussée de plusieurs dizaines de milliers d'années, notamment à cause du taux élevé de CO₂ dans l’atmosphère. Ce niveau de CO₂ résiduel perturbe les cycles naturels, en annulant ou en retardant les conditions orbitales favorables à une glaciation. Actuellement, l'orbite terrestre est relativement circulaire, ce qui contribue déjà à repousser une glaciation. Toutefois, le niveau élevé de CO₂ agit comme un facteur supplémentaire, empêchant les refroidissements nécessaires à l’installation d’une nouvelle ère glaciaire. Ces conclusions sont soutenues par des travaux, notamment ceux de Didier Paillard.
💬 On entend souvent que tel été récent est le plus chaud jamais enregistré. Pourtant, on apprend aussi qu’à d’autres périodes, comme au Crétacé, il faisait encore plus chaud (par exemple, une température moyenne de 18 °C sur la planète). Cela peut prêter à confusion pour le grand public, voire pour les élèves. Est-ce bien le cas ? Comment l’expliquer aux élèves tout en soulignant l’urgence de l’action, même si on sait qu’il a déjà fait plus chaud par le passé ?
Oui, cette confusion est compréhensible, mais elle peut être clarifiée en précisant les références utilisées. Lorsqu'on parle des températures « jamais enregistrées », cela fait généralement référence à des enregistrements météorologiques modernes, qui couvrent environ 150 ans. Pour aller au-delà, on s’appuie sur des archives climatiques à haute résolution(anneaux d’arbres, carottes glaciaires, sédiments) qui permettent de reconstruire les températures sur plusieurs millénaires. Par exemple, l’été 2023 a été confirmé comme le plus chaud des 2 000 dernières années dans l’hémisphère nord, selon une étude récente (Nature). Cela en fait un événement inédit à l’échelle des temps historiques et modernes.
WEBINAIRE#3 "Activités humaines, effet de serre et climat", avec François Dulac, chercheur au CEA et médiateur pour l'IPSL
💬 Pourquoi la température moyenne de la surface de la Terre est-elle établie sur 30 ans, en particulier pour la période 1961-1990 ?
La période de 30 ans est une norme établie par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) pour définir une moyenne climatique. Cette durée permet de lisser les variations d’une année à l’autre, tout en offrant une base statistique robuste pour comparer les tendances climatiques. La période 1961-1990 a été choisie comme référence car elle correspondait à une époque où le climat mondial était encore relativement stable et bien documenté. Cependant, dans le contexte actuel de changement climatique rapide, cette référence peut devenir moins pertinente. On peut alors être amené à utiliser des périodes plus courtes, par exemple 10 ans, pour mieux représenter les évolutions récentes.
💬 Que se passe-t-il au niveau moléculaire pour le CO₂ et le méthane lorsqu’ils renvoient une partie de l’énergie vers la Terre ?
Ces gaz, appelés gaz à effet de serre, ont la capacité d’absorber le rayonnement infrarouge émis par la surface terrestre. Cette absorption déclenche une augmentation de l’agitation moléculaire, ce qui correspond à des vibrations des liaisons dans les molécules. Une fois excitées, ces molécules réémettent le rayonnement absorbé dans toutes les directions, y compris vers la surface de la Terre. C’est ce processus qui piège la chaleur dans l’atmosphère et contribue à l’effet de serre additionnel.
Ces gaz, appelés gaz à effet de serre et dont les concentrations dans l'air augmentent beaucoup du fait des activités humaines, ont la capacité d’absorber le rayonnement infrarouge émis par la surface et l'atmosphère terrestre de façon à stabiliser la température planétaire. Cette absorption déclenche des vibrations des liaisons entre atomes dans les molécules, ce qui provoque une augmentation de l’agitation moléculaire. Ces molécules se désexcitent en réémettant dans toutes les directions le rayonnement absorbé, y compris vers la surface de la Terre. C’est ce processus qui piège de l'énergie qui serait autrement perdue vers l'espace et contribue à un effet de serre additionnel réchauffant la basse atmosphère et la surface terrestre.
WEBINAIRE#4 "Les questions socialement vives en éducation", avec Nicolas Hervé, professeur en didactique des QSV et des transitions écologiques à l’ENSFEA
💬 Suite à une question sur les peuples autochtones et les dynamiques de domination : comment réagir si, par exemple, des élèves disent qu’ils préfèrent faire partie des dominants ou considèrent qu’il est normal que les peuples autochtones ou les plus vulnérables ne survivent pas ?
Effectivement, dans l'enseignement des QSV, il peut y avoir des réactions non prévues des élèves. Si on qualifie de "vives" ces questions, c'est justement parce qu'elles peuvent engendrer dans la classe des réactions "vives" chez les élèves.
Un objectif de ces dispositifs est de donner un espace de parole aux élèves pour qu'on puisse, en tant qu'éducateurs, les aider à formuler des opinions et à les rendre plus complexes, notamment en dépassant les idées reçues ou les stéréotypes. Il faut donc accepter une certaine part d'expression "désinhibée". Par contre, il est évident que les propos contraires à la loi ne sont pas tolérés (racisme, discrimination, appel à la haine) et ce cadre doit être préalablement installé avec les élèves. C'est pourquoi, avant de faire débattre les élèves, il est important de nourrir leur réflexion et de les faire réfléchir sur différentes dimensions du problème, pour éviter qu'ils en restent aux idées reçues, et qu'ils travaillent non seulement la compréhension des enjeux, les aspects conceptuels, mais aussi les implications éthiques.
Dans le cas que vous mentionnez, cela se joue à la fois dans la préparation de la séquence (construire des moments d'expression des émotions ou d'accueil des points de vue, s'assurer que les élèves aient accès à des documents montrant différentes dimensions, par exemple les liens entre les inégalités sociales et les impacts environnementaux à différentes échelles spatiales) et la réaction sur le moment lors des interactions avec les élèves. Il s'agit de gérer les interactions pour que l'élève comprenne que son point de vue n'est pas acceptable d'un point de vue éthique, et qu'en s'inscrivant dans ces logiques de domination il se rend lui même plus vulnérable aux changements en cours. Le débat avec d'autres élèves et d'autres points de vue peut conduire à construire des arguments contre cette idée. Pour comprendre un peu mieux ce processus, je vous invite à regarder la vidéo suivante filmée au lycée agricole de Gap sur la problématique du loup.
💬 Existe-t-il un dossier d’arguments pour répondre aux climatosceptiques ?
En 2024 en France, il y a 33 % de climatosceptiques ou dénialistes. Cette proportion provient de la 6ème édition de l’Observatoire International Climat et Opinions Publiques. Cette proportion importante est à relier à des mouvements militants dénialistes oeuvrant sur les réseaux sociaux. Vous pouvez à ce titre prendre connaissance du rapport Les nouveaux fronts du dénialisme et du climatoscepticisme qui explique cette dynamique. On peut trouver des dossiers facilement sur internet et assez bien faits, notamment par le Réseau Action Climat ou les décodeurs du journal Le Monde. Sur l'action climatique, et les personnes qui pensent que celle-ci est vaine, il existe également un dossier appelé "les discours de l'inaction", on peut en trouver une version vulgarisée en français sur cette page. Déconstruire les discours de l'inaction ("il est trop tard pour agir", "en France, on émet très peu mondialement donc notre action n'aura pas d'impact sur le climat", etc.) est aussi un moyen d'engager les élèves à agir.
💬 Le climato-scepticisme est-il dû au manque de savoirs sur la situation actuelle, à un déficit de discussion ou à d’autres raisons ? Quels seraient les leviers pour agir ?
Le climato-scepticisme est une fabrique du doute, avec des lobbys qui œuvrent pour que les choses ne changent pas, en lien en particulier avec des intérêts financiers. Leur action vise à produite volontairement de l'ignorance dans un discours construit qui vise à freiner les processus de productions scientifiques ou à propager des informations erronées.
Pour vous documenter sur ce point, il y a le rapport Les nouveaux fronts du dénialisme et du climatoscepticisme, et il y a aussi le livre Les marchands de doute écrit par les historiens des sciences Naomi Oreskes et Erik M. Conway.
Il y a deux stratégies pour agir contre le climatoscepticisme à mon sens : soit contrer les arguments, c'est-à-dire batailler point par point pour démontrer qu'ils sont faux ; soit dévoiler la structure sociale qui produit ces discours et éclairer le rôle des lobbys, leur financement, leur idéologie. Travailler sur les QSV permet de travailler ces deux points de concert.